
En tant qu’étudiants en communication multilingue, nous sommes, en principe, en faveur de la diversité culturelle. Celle-ci ne serait-elle pas mise à mal s’il était à nouveau possible de déverser publiquement sa haine sur un groupe donné ? C’était le grand sujet en cette fin avril 2022 : le rachat de Twitter par Elon Musk inquiète. Ce dernier a acquis la plateforme pour la modique somme de 44 milliards de dollars et détient désormais la majorité des parts, soit 9,2%. Il dit vouloir rendre à cette « place publique » une liberté (d’expression) totale et espère pouvoir concrétiser ce projet en rachetant l’intégralité des parts dans le futur. Le PDG de Tesla et de SpaceX s’offre, au passage, une influence politique considérable, alors que Twitter est accusé de favoriser les démocrates. Rappelons qu’en matière de politique, Elon Musk encourage Donald Trump, dont le compte Twitter a été suspendu définitivement suite à ses propos virulents et les conséquences qu’ils ont engendrés, notamment l’attaque du capitole. Le débat fait donc rage entre les pro-Musk, favorables à la nouvelle politique de liberté d’expression et les anti-Musk, qui préfèreraient maintenir la modération des contenus.
Notre communauté soutient plutôt les précédentes conditions d’utilisation, éliminant strictement les propos haineux et/ou déplacés. D’ailleurs, Laura Calabrese, professeure de notre faculté, s’est exprimée à ce sujet, et la réponse est claire : pour conserver le respect et les bonnes relations entre les différentes cultures, surtout dans une ville aussi cosmopolite que Bruxelles, la « censure » reste une arme essentielle.
En effet, l’ancienne politique veillait à préserver la bienveillance du réseau social, mais permettait tout de même aux utilisateurs de s’exprimer librement (au sens européen ; la liberté d’expression du point de vue américain est bien plus radicale). Si Elon Musk parvient à ses fins, l’accumulation de la frustration engendrée ces dernières années risquerait de provoquer une nouvelle vague de haine d’autant plus violente. Cette nouvelle vague serait évidemment préjudiciable, et particulièrement pour notre communauté, fervente défenseuse de la diversité culturelle.
Dans ce contexte, la question persiste : doit-on légitimer toutes les opinions au nom de la liberté d’expression de chacun ? Doit-on laisser place à la désinformation, à la xénophobie, au racisme, etc. dans l’espace public ? Le risque, c’est de faciliter l’échange et la rencontre de personnes malintentionnées, voir extrémistes, et d’assister à des rassemblements dangereux ; les différents groupes se sentiraient isolés et incompris. On pourrait toutefois penser que la modération ne fait qu’éviter le problème plutôt que le résoudre, et qu’en permettant le débat ouvert et public, les propos extrémistes ne tiendraient simplement pas debout. Peut-être que ces personnes arriveraient à se raisonner elles-mêmes, qu’elles auraient simplement besoin de se sentir écoutées, au même titre que les autres. Le risque est néanmoins trop grand pour notre société, qui a plus à y perdre qu’à y gagner.
Sara Rodriguez Muroni